La bannière est de retour après restauration

Qui aurait pu penser qu'un tel objet se trouvait dans l'église de Saint Péver ? Pas grand monde apparemment puisque c'est bien par hasard que Céline Robert, conservatrice des antiquités et objets d'art pour le département et Christine Jablonski, conservatrice des monuments historiques pour la DRAC, ont découvert ce véritable trésor. « Cette bannière est considérée comme faisant partie des plus vieilles, voire la plus vieille de Bretagne » explique Céline Robert. « C'est une pièce qui aurait sa place dans un grand musée » renchérit Christine Jablonski. Effectivement, les Orfrois (parties brodées avec des personnages) dateraient du XVIe siècle. Pourtant, non par malveillance mais plutôt par méconnaissance, la commune ne prend aucune mesure relative à sa conservation durant de nombreuses années. Bien qu'inscrite aux monuments historiques depuis le 6 juin 1918, cette très vieille dame est régulièrement portée en procession lors du pardon de Restudo et, entre chaque sortie, exposée sur son bâton de procession devant le grand vitrail de l'église le reste du temps.

Thérèse et Marie-Claire, deux habitantes de la commune témoignent même de leur travail de couture sur la bannière à la demande de Michel, en charge de la procession. « On a peut-être fait plus de mal. Mais il y tenait à sa bannière et comme elle partait en lambeaux on a recousu certaines parties afin qu'elle puisse continuer à avoir sa place dans la procession ». Déjà restaurée en 1980, elle est ensuite présentée au Château de la Roche Jagu durant l'exposition « Trésors secrets » en 1991. « L'ampleur de sa dégradation entre 1991 et 2017 est impressionnante » constate Céline Robert, « il était grand temps de faire quelque chose ». En effet, les rayons UV, l'humidité, la poussière, ont eu raison de la couleur pourpre du tissu. Au printemps dernier, elle est donc envoyée en restauration auprès d'Angélique Durif, restauratrice du patrimoine textile, résidant à proximité de Rennes. Le coût total des travaux comprenant les mesures d'urgence, la restauration et la fabrication de la boîte de conservation s'élève à 8.618,00 € HT, avec une prise en charge à hauteur de 50 % par la DRAC, 15 % par la région, 10 % par le département et 25 % par des fonds propres.

Voici donc la bannière aux Orfrois de retour chez elle pour le plus grand bonheur de tous. Elle est maintenant rangée dans une boîte de protection spécifique avec ventilation et isolation, bien à l'abri de la lumière, pour la préserver de l'usure du temps. Il est évidemment interdit de la suspendre ou de la mobiliser. « On passera régulièrement voir si elle va bien » proclame Céline Robert. Reste maintenant à se poser la question de sa présentation au public et le coût qu'engendrerait une possible réplique. Un livret explicatif est d'ores et déjà consultable en mairie. « Il faut que vous ayez conscience de la valeur d'un tel objet » insiste Christine Jablonsky. À noter qu'une étudiante de Rennes a décidé d'en faire le sujet de sa thèse, ce qui permettra, peut-être, de percer les mystères entourant cette vieille dame. La bannière aux Orfrois de Saint Péver n'a pas fini de faire parler d'elle !

Article et photo de Soazig Descharettes pour l'Echo d'Armor

Extraits du rapport de restauration DRAC Bretagne et CAOA Côtes d’Armor

Description : Le décor de la bannière (environ 144 par 103 cm) est un assemblage cruciforme d’orfrois du XVIeme siècle et d’un tissu de velours de soie brodé aux fils argentés (ou d’or ?) de même époque. Les orfrois ont été réunis par coutures aux lés de velours, juxtaposés bord à bord ; le velours, tissu fragile, a donc reçu plus vivement les tractions des orfrois –lourds- et les mouvements de la bannière. Les coutures de l’assemblage réalisé ont été dissimulées par des galons : l’un est « récent » (XXème ?) sobres, à ronds rouges sur fond ocre ; le second, très lacunaire, très partiel (sur une seule face) dissimulé sous le premier galon, est un taffetas vert (toile de soie) (XVIIIème- XIXème?) Nous ne connaissons pas l’époque à laquelle ces textiles - velours de soie et orfrois - ont été réunis pour former une bannière de procession, à laquelle on aura ajouté une frange métallique ternie et des clochettes (étain ?).
Les portraits de saints, évangélistes, de la Vierge et de Dieu le Père ont été « reconnus » par leurs attributs ou postures ; ils sont présentés dans des attitudes à l’antique, dans des niches aux voûtes en « coquillages », vêtus de toges. Ces orfrois brodés étaient autrefois appelés ymages sur champ d’or. Les motifs des broderies rappellent les décors riches en courbes Renaissance (rinceaux, arabesques, coquilles, balustres/vasques…).
Orfroi : Large bande d'étoffe richement brodée d'or ou d'argent, destinée à l'ornement des chapeset chasubles... Lé : bande d'étoffe

Voir le rapport de restauration



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